luxe, calme et volupté. (elias)

◊  dans la famille, on a la mâchoire carrée et les cheveux blonds depuis des décennies ; les hommes et les femmes se suivent en respectant le même modèle de charisme et de noblesse qui caractérise les Weiss. Elias est l’aîné des enfants de la branche principale, et sur ses épaules pèsent le poids du futur de la famille. Très impliquée dans son commerce d’orfèvrerie, elle est réputée pour s'y dévouer et imposer le travail à ses enfants pour les responsabiliser. Les âmes, chez eux, ne lambinent guère. Très tôt, néanmoins, le fils s’oppose au père. En grandissant, il cherche à dévier du destin qu’on lui a imposé et prendre la voie du destin qui est sien, qu’il se sera choisi lui-même. Le jeune garçon emprunte alors la voie du combat et la maîtrise de l’épée. Le noble devient alors soldat, et danse depuis au son des fers s’entrechoquant pour la pérennité de la famille royale.

◊  il y a, dans son cœur, le désir de découvrir le monde, d’accomplir l’impensable, mourir sous les louanges, de vivre ce que les livres garderaient en souvenir dans leurs pages immortelles. Elias aurait pu se destiner à la diplomatie, mais son cœur s’est livré à la guerre, et nombreux sont ceux à avoir trouvé ce choix pour le moins étrange. L’homme a toujours été discret dans ses actes, pudique dans ses pensées ; l’agressivité contenue, la colère maîtrisée. Ses combats sont toujours semblables à des danses de virtuoses s’adonnant à un spectacle plus qu’à un combat à la victoire. Un homme prompt à amadouer plus qu’à s’enflammer, qui apaise les tensions plutôt que de les enflammer. C’est un homme affable qui a toujours un bon mot ou une remarque amusante, qui se plaît aux discussions politiques et culturelles ; son éducation l’empêche tout débordement, et sa contenance fait sa force dans la fosse aux lions qu’est la cour royale. Cependant son image est fausse, comme tant d’autres, et son calme apparent cache toujours le besoin impérieux de remettre les gens à leur place et de se venger, humilier les mauvaises âmes. Son sens aigu de la justice est mesquin, perfide mais toujours avec bon goût et retenue, de sorte qu’il n’ait pas à ternir sa noble réputation.

◊  le père imposant a longtemps cherché à façonner sa vie afin qu’elle se fonde au mieux dans l’histoire familiale. Mais Elias, libre de corps et d’esprit, s’est très vite confronté à lui par pure provocation. Avec le temps, il lui est apparu qu’il ne pourrait jamais suivre le pas de son père et de son grand-père bien aimé ; les bijoux l'attirent mais il les préfère sur les autres. Sa haute stature et sa large carrure l’ont poussé à apprendre et maîtriser l’art de l’escrime à un jeune âge, et pousser l’apprentissage dû à un jeune noble, à l’adapter aux besoins d’un soldat. Ainsi, lorsqu’il a choisit cette voie, son père est entré dans une colère folle, comprenant que son fils souhaitait s’éloigner de lui et de son influence. Il jugeait ce métier indigne de son rang, qui le dévaloriserait aux yeux des nobles de la cour. Le conflit a duré longtemps mais devant la réputation grandissante de son ainé, qui finit par rejoindre les rangs de la garde royale, il n'a put que se taire et reporter ses ambitions sur son deuxième fils.

◊  ses positions sur la situation pesant sur le royaume sont gardées secrètes. Si en public il n’hésite guère à prendre le parti des humains et condamner les activités abusives des sorciers, dans l’intimité familiale ses propos évoluent dans une approche plus sombre. Il répugne, dans le fond, à participer à une nouvelle purge de quelque façon que ce soit, et contribuer à la mort de personnes innocentes comme ce fut le cas dix années auparavant. « Je ne me suis guère engagé dans la garde royale pour tuer mon peuple », se dit-il souvent. Il est pourtant des gens dont il maudit l’existence.. Les conspirateurs ayant voulu la mort des Weiss, les lames royales qui ont tué son ami. Elias ne les oublie pas. Il rêve du jour où il pourra venger les disparus et laver la cicatrice qui lacère en deux le dos de sa mère. Comme le reste de sa famille, il pleure ses proches et exige justice en silence. La purge a été un crime envers Corona entier, et les responsables vivent encore en toute impunité, peu importe le camp. Comme beaucoup de personnes dans le royaume, Elias a cédé aux sirènes de la vengeance. Mais la sienne est patiente, latente, silencieuse. Un jour viendra où elle s’appliquera et où Elias n’aura qu’un rire méprisant pour défigurer son visage.

◊ aujourd'hui l'homme parcoure les allées du château et exhibe son épée comme l'exige son métier. Il scrute, dévisage, patiemment, attendant que l'on désobéisse aux règles pour agir. Sa position privilégiée le fait s'entretenir avec les nobles, entendre des conversations qu'on aurait voulu secrètes, voir des actes que l'on cacherait aux autres aristocrates. A la différence des autres gardes de simples ascendances, Elias est comme un apparat et sa présence apaise. Il laisse aux autres le soin d'intriguer et de s'écorcher sur les questions politiques, mais lui-même participe à sa façon, dans l'ombre des couloirs et aux extrémités des rassemblements, là où on ne l'attend pas. Les mauvaises langues diront que sa présence au sein du corps militaire est intéressée et qu'il recherche des buts personnels au détriment de ses véritables fonctions ; la vérité appartient à qui se l'approprie.
Lors de ses moments de pause et qu'il quitte l'uniforme de la garde, il redevient le noble distingué que l'on connaît, mais un étrange vide remplit ses yeux bleus et son esprit s'évade dans des contrées embrumées.