Hazel ♦ All of my memories keep you near.

Un jour, un homme venant du royaume de Dan Bröch tomba amoureux d’une femme de Corona. Lui, apothicaire, elle, cuisinière dans une taverne, se marièrent et décidèrent de poursuivre la vie dans un royaume prospère et où la paix régnait entre Hommes et Sorciers. Une paix fragile et sans cesse menacée mais qui subsistait. Ainsi, la jeune femme dévoila rapidement ses talents à son époux, lui s’émerveillant de ces talents qu’elle possédait, de cette magie qui l’imprégnait. De cet amour pur et sincère naquit une fille. Ses cheveux bruns portaient les reflets orangés des mèches de son père et ses yeux, aussi bleus que les mers limpides du Nord, était un héritage de sa mère. L’enfant reçut un nom doux, à l’image de ses traits. Hazel.

Née à Corona, la petite fille eut la chance de ne pas naître dépourvue de bien. Fille unique, elle serait l’unique héritière de cette échoppe d’apothicaire reconnue que ses parents avaient créée et qui leur avait permis d’amasser une petite fortune, leur offrant une vie bien plus douce qu’à leurs débuts. Son père préparait les concoctions, son épouse les vendait sur le petit comptoir de leur échoppe, et pendant ce temps, Hazel jouait à imiter son père dans l’arrière-boutique, riant dès qu’une catastrophe arrivait, provoquée par ses mélanges improbables et aux conséquences tant malodorantes que parfois débordantes. Pourtant, jamais elle n’était punie. Enfant chérie pour ses parents, elle était la prunelle de leurs yeux, la douceur de leur existence. Certains jours, elle partait en forêt avec eux et à l’âge de cinq ans, elle était déjà capable de différencier les plantes, connaissant leurs propriétés curatives ou, au contraire, leurs dangers. Elle était mignonne et tous les commerçant voisins de leur parents s’étaient pris d’affection pour cette jeune enfant au regard luisant et si clair qu’il en était perçant malgré elle. Sa mère ne lui cacha jamais sa véritable nature, s'amusant à troubler la quiétude du bain de l'enfant pour mieux provoquer son hilarité, ou modelant le fluide pour qu'il prenne la forme de fleurs.

Elle grandit, choyée comme une enfant noble sans en avoir le titre, apprenant à surpasser son père et sa mère dans des préparations innovantes qui assurerait son nom dans l’avenir et lui permettrait de poursuivre la voie offerte par ses géniteurs. Tout aurait pu être parfait. Mais un soir, alors qu’elle était âgée de onze ans, prenant son bain en toute décontraction, elle s’endormit. Son sommeil était aussi profond qu’agité et le cauchemar qu’elle fit provoqua son réveil… Et le réveil de ses pouvoirs. L’eau de la baignoire s’envola dans une vague immense avant de s’écraser sur le sol de la pièce. Plus une goutte d’eau ne se trouvait sur sa peau et son premier réflexe fut de hurler. Affolée, sa mère était entrée à la volée, découvrant la scène en laissant échapper un sourire. Il lui fallut plusieurs minutes pour calmer sa fille, terminant alors par poser une main sur sa joue ce qui eut pour effet de l’apaiser définitivement, utilisant son second pouvoir sur elle afin de forcer son esprit à mieux vivre la situation. Les iris de ses yeux devinrent dorés tandis qu’elle lui montrait comment elle pouvait animer cette surface miroitante et transparente avec facilité, poussant sa fille à réitérer l'exploit sans la moindre crainte. Elle aussi le pourrait, un jour. Il lui faudrait pour cela s’entraîner.

Si les sorciers ne se cachaient pas, sa mère ne souhaitait pas révéler au monde entier leurs talents cachés, préférant entraîner sa fille dans l’arrière-boutique, comme les expériences qu’Hazel faisait jadis. A n’en pas douter, un jour, elle serait douée, elle aussi. Mais les choses se compliquèrent et arriva cette terrible nuit. Les cris la réveillèrent, la tirant de son sommeil sans rêve. Ses parents discutaient de manière engagée et si elle ne parvint pas à comprendre ce qu’ils se disaient, un simple regard par la fenêtre lui suffit pour comprendre. Le sang. Partout, dans les rues, sur les pavés, le sang avait coulé. Des flammes surgirent de mains protectrices pour mieux se taire, le sorcier les ayant fait apparaître venant de se faire égorger par un homme. Le chaos était incompréhensible et Hazel courut retrouver ses parents. Son père ferma la porte derrière lui alors que sa mère pleurait. Serrant Hazel contre elle, elle fut la seule à pouvoir apaiser son esprit belliqueux. Elle voulait sortir, elle voulait défendre ses pairs devant l’injustice qui sonnait encore et toujours. Mais le calme se fit dans son esprit, forcé par sa mère qui lui demandait pardon tout en précisant qu’ils faisaient cela pour la protéger, elle, leur fille, leur unique enfant si précieuse. Plus tard, elle apprit que son père avait participé à ce massacre, se cachant derrière cette protection qu’il souhaitait créer pour elle. Une fausse excuse qu’elle eut bien du mal à lui pardonner. Mais l’amour, parfois, fait faire des choses terribles et incompréhensibles. Elle le comprenait.

Dissimulant ses pouvoirs, elle n’arrêta pas son enseignement. Chez elle, dès que les regards se détournaient, elle améliorait sa capacité à maîtriser l’eau, ses yeux dorés menaçant le doute qui l’habitait quant à ce qu’elle devait faire. Mais, parfois, la vie est faite de rencontre impromptues et inattendues qui viennent sublimer votre existence. Habituée à retrouver quelques amis, fils et filles de commerçants bourgeois, elle était entrée dans une taverne pour les retrouver, buvant quelques verres à leurs côtés. Elle ne remarqua pas les regards incessants que certains hommes pouvaient lui adresser. Ce ne fut que lorsqu’elle sortit qu’elle comprit avoir été suivie. Faisant face au danger, elle se retourna pour mieux défier son assaillant. L’homme était armé de mauvaises intentions et venait clairement dans le but de la défaire de tout l’honneur qu’elle possédait. Si certaines se seraient retrouvées pétrifiées de peur, l’instinct d’Hazel prit le dessus. Elle aurait pu prendre le dessus avec ses pouvoirs, mais la chose n’était pas nécessaire et elle ne voulait pas lui faire du mal. Elle ne souhaitait pas devenir l’une de ces sorcières qui agissent pour anéantir cette race inférieure. Aussi, le laissant approcher, elle lui envoya un coup de pied bien placé entre les jambes forçant l’homme à tomber à genoux. C’est à ce moment qu’elle remarqua l’autre homme qui se trouvait là. D’abord persuadée qu’ils étaient de mèche, elle lui envoya volontiers son petit poing fermé dans la mâchoire mais, rapidement, elle comprit qu’il souhaitait seulement s’assurer qu’elle allait bien.

Elle ne sut si ce fut cet aspect chevaleresque ou ses yeux clairs encadrés par ses mèches noires, mais dès que son regard croisa le sien, elle sut au fond d’elle qu’il était ce prince charmant que les histoires racontaient. Prétextant vouloir le remercier, elle fit entrer Aedan dans l’échoppe de ses parents pour l’aider à soigner la joue qu’elle avait elle-même malmenée. Ils discutèrent là une grande partie de la nuit avant qu’il ne reparte. L’homme était marin, la mer était sa demeure quand elle préférait la terre et son lit douillet. Pourtant, elle ne douta pas un seul instant de cet amour que son cœur la poussait à avoir pour lui. Même quand elle découvrit ses véritables pensées concernant ceux de son espèce. Il haïssait les sorciers et, pire, les traquaient. Il faisait partie de ceux qui leur donnait la chasse. A cette annonce, elle songea à fuir, à mettre de la distance entre eux pour, doucement, laisser leur relation se détruire avec le temps. Mais toujours, son cœur la rappelait à lui. Plusieurs fois, ses parents, et notamment sa mère, la mirent en garde à ce sujet, essayant de lui faire comprendre qu’elle se mettait en danger inutilement. Mais dès qu’Aedan revenait à terre, elle était là, à l’attendre sur le quai, croisant son regard, captant son attention pour qu’il accourt finalement à elle, l’embrassant avec une passion infinie.

Etait-ce la nature qui leur rappela que leurs espoirs et aspirations étaient trop différentes pour qu’ils puissent s’unir ? Lui proposant une promenade sur les flots, il posa le genou à terre pour mieux lui passer la bague au doigt. Une bague d’or blanc sertie d’une topaze magnifique. Mais à peine eut-elle offert sa réponse que la tempête se déchaina. Se saisissant de la barre, Aedan ne vit que trop tard la vague qui déstabilisa Hazel. Sa tête heurta le bastingage et son corps passa par-dessus bord, aspiré par les vagues. Elle aurait dû mourir, ce jour-là, noyée par cette épouse jalouse que le marin semblait vouloir quitter pour une autre. Mais l’inconscient de la jeune fille activa son pouvoir. Sous ses paupières closes, ses pupilles améthyste brillaient, encerclant la jeune fille d’un cocon protecteur, la poussant à dériver vers d’autres contrée.

Quand elle ouvrit les yeux, un grand vide gisait dans son esprit et dans son corps. Sa mémoire s’était envolée autant que son énergie. L’homme chez qui elle avait trouvé refuge lui raconta comment il l’avait trouvée sur une plage d’Arendelle. De son accent du Nord, Hans lui expliqua qu’elle serait morte de froid et que tout le monde au village se demandait déjà qui était cette jeune inconnue qu’une vague étrange avait déposée sur la plage. Mais aucune réponse ne vint à la jeune femme. Rapidement, alors qu’elle était incapable de retrouver ne serait-ce que son nom, elle répondit à celui d’Hylda, baptisée de la sorte par celui qui l’avait trouvé, un sorcier maîtrisant le pouvoir de contrôler la glace. Ce n’était pas son seul pouvoir. Rapidement, il dévoila à la jeune fille sa capacité à explorer l’esprit des gens, de fouiller leur mémoire pour mieux leur voler leurs souvenirs. L’idée folle d’utiliser ce don pour ramener à Hylda sa mémoire fut mentionnée mais avant cela, il lui faudrait bien plus d’énergie. Les semaines passèrent tandis qu’elle redécouvrait cette capacité à utiliser l’eau et qu'elle apprenait à l'améliorer. Ce ne fut d'ailleurs pas la seule chose qu'Hans lui enseigna, prenant soin de lui montrer comment se défendre par l'art du combat. Un soir, alors qu’elle discutait avec son sauveur, elle avait préparé une mixture capable de guérir les plaies, incapable d’expliquer comment. Ses souvenirs n’étaient cachés que par un voile qui finit par tomber, aidé par le don de Hans. Tout lui revint en mémoire. Ses origines, sa famille, son amour… Ses doigts se refermèrent sur la bague qu’elle portait en pendentif, comprenant enfin son origine. Aussi, elle murmura son propre prénom, dévoilant son identité à son hôte qui lui adressa un doux sourire. Ce compagnon de route n’eut pas le cœur à la retenir quand son choix fut fait de repartir. Qu’importait les dangers, tous devaient la penser morte, noyée, quand, au contraire, la mer l’avait révélée plus forte que jamais.